Mardi 19 février, brouillard, le midi le temps se dégage : beau temps ensoleillé l’après-midi.

Un grand jour, la première équipe est montée. Après le déjeuner et un moment d’échange autour d’un café, nous affrétons le Boxer pour filer sur la Margirondière : Nico (au volant), Yann et José derrière, et Rachid et Hervé à l’arrière.

Le temps est maintenant dégagé, nous apprécions. L’équipée joyeuse longe le bras du lac, Rachid me montre les frênes qu’il a taillés récemment. Tout le monde passe à la Margirondière, c’est bien connu : José m’avait montré à midi les ‘gondins’ ramenés du matin avec Émilien, 6, dont un de belle taille… Là,  en face, de l’autre côté du ruisseau des Arcis, Jean-Charles plante des piquets avec son équipe, le bruit de la machine-qui-assène-des-coups scande notre avancée…

Impressionnant comme l’eau a encore monté, le lac est quasi plein, l’eau vient lécher les joncs et les roseaux.

Nous arrivons sur le site et commence un tour informel : discussions et commentaires arrêtent la marche, nous nous focalisons sur des arbres, des tiges de frênes, des fourrés, le sol et l’herbe. Si l’eau attire note attention un temps, des sensibilités dans le groupe nous portent vers les terres.

Nous commençons à gamberger : là des assises, se poser, pique-niquer, pouvoir s’allonger même ; ailleurs un entrelacs de tiges de frênes ; une impression de clairière m’arrête et nous partageons, causons d’aménager l’espace, pour le rendre accueillant… Un groupe d’arbre interpelle Nico : il verrait bien un hamac lui donner vue sur le lac… Tiens, le lac revient, mais ce sont les vues qui nous motivent, la berge est devenue inhospitalière, la végétation a été engloutie.

Au grès des nos déplacements le lac s’éloigne, nos pensées aussi ; les fourrés ou la forme de certaines cépées d’arbres appellent des caches, des formes sculpturales… Yann et Hervé manipulent une cépée : les branches sont rassemblées pour rappeler la forme œuf, le groupe arrive en renfort ; Nico réagit plus loin à un arbre, il voit une forme tipi : suffirait juste de casser les branches, de les incliner à terre ; Hervé me raconte un labyrinthe dans les broussailles, un sentier qui serpente en un circuit aléatoire ; José dessine au sol un jardin… Je sens une jubilation monter, les langues sont devenues labiles, tout semble maintenant pouvoir nous interpeller, les lieux nous ‘parlent’.


Nous terminons notre périple par un arbuste coupé, un tronc de 1,3 m de hauteur : Nico me parle de totem, je rappelle nos manipulations avec les tiges de frênes : la forme totem ne pourrait-elle pas naître de tels entrelaçages, embarquant des matériaux dans son lacis, pourquoi pas des branches, même un crâne de ragondin ? Nico réagit : “ça serait des assemblems!” Oui, le mot est lancé ; nous allons continuer d’imaginer des interventions, librement… pour le plaisir d’exercer notre créativité ; laisser surgir des mots.

En sortant du site je sollicite Hervé sur le ‘cadre’, cette vue que nous avions repéré à l’entrée de la Margirondière. Nous échangeons sur le processus à mettre en œuvre pour donner corps à une situation : couper ou non des branches ; ajuster le point de vue ; construire une assise ; trouver la bonne distance… Je sens l’équipe prête à s’engager plus en avant, nous avons accordé nos langues.

Aujourd’hui se sont dégagées deux grandes directions dans notre approche du site : statique et mobile ; il semblerait qu’elles vont guider nos choix, organiser l’espace et induire une fréquentation des visiteurs.

A suivre, lundi prochain, avec un nouveau quintette.

 

 

 

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[ Images et textes : courtesy Gilles Bruni, « Itinérance » résidence artistique à l’Éclaircie, Cholet ]

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